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Communiqués

Vers un apprentissage fracturé ?

ANASUP exprime ses plus vives inquiétudes face aux risques de démantèlement des CFA interprofessionnels en réseau que fait peser la réforme sur l’apprentissage dans l’enseignement supérieur.

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L’apprentissage dans l’enseignement supérieur a connu un développement significatif et continu ces dernières années. Ce développement ne doit rien au hasard.

Il répond d’abord aux besoins des entreprises et aux attentes des jeunes. En 2017, ce sont plus de 152 000 jeunes de l’enseignement supérieur qui ont choisi l’apprentissage.

Il tient surtout au fort partenariat mis en place entre les établissements de l’enseignement supérieur et les CFA interprofessionnels en réseau, principalement à gouvernance paritaire. Ces CFA sont dits « en réseau » car ils proposent un ensemble de formations issues d’un ou de plusieurs partenaires pédagogiques. Ils sont regroupés au sein de l’ANASUP, qui compte 40 CFA du supérieur et près de 50.000 apprentis ; ils s’efforcent depuis des années de faire de l’apprentissage une voie d’excellence et de réussite, accessible à tous les jeunes, à tous les niveaux de formation, et pour toutes les filières professionnelles de manière transverse. Si la même évolution des effectifs d’apprentis n’a pas été observée à d’autres niveaux ou dans d’autres centres de formations, loin s’en faut, c’est aussi parce que des causes organisationnelles et structurelles sont en jeu.

Dans les universités et les grandes écoles, un certain nombre d’éléments sont constitutifs de la souplesse du dispositif de l’apprentissage, telles que la possibilité de co-organiser les cursus avec les entreprises, l’annualisation du service des enseignants ou encore l’existence de passerelles entre la formation à temps plein et la formation en alternance dans le parcours des jeunes.

Néanmoins cette souplesse propre aux établissements d’enseignement supérieur ne suffit pas à elle seule à expliquer le développement de l’apprentissage dans le Supérieur. L’action de CFA interprofessionnels en réseau est décisive pour intégrer cette souplesse dans le dispositif de l’apprentissage.

Ces CFA entretiennent des liens très étroits avec les milieux professionnels puisque leurs instances sont composées à tous les échelons de représentants des entreprises, associés à ceux des établissements d’enseignement supérieur ; ce sont eux qui font le lien avec les régions et l’Etat (SAIA), afin de mettre en place un apprentissage qui soit au plus près des demandes exprimées par les différents acteurs socio-économiques. Ils ont également fait leur preuve pour professionnaliser les équipes pédagogiques en matière d’alternance et de relations avec les entreprises. Ils ont su faire cohabiter les universités et les grandes écoles en trouvant de nouveaux équilibres. Ils se sont surtout organisés pour accompagner leurs partenaires pédagogiques, les apprentis et les entreprises dans la mise en adéquation des contenus des formations avec les besoins en compétences du tissu économique des différents territoires et favoriser l’innovation.

Les parties prenantes trouvent au sein de ces CFA, structures légères et souples, des espaces privilégiés et équilibrés de dialogue, d’échanges de pratiques, d’informations fiables et adaptées, où les critères de qualité et de suivi des jeunes sont primordiaux. Par la mise en œuvre d’actions pour favoriser « la diversité et l’égalité des chances » ils contribuent aussi à démocratiser davantage l’accès à l’enseignement supérieur. En se positionnant en dehors des opérateurs de formation, ces CFA évitent les conflits d’intérêt et peuvent réguler de manière totalement neutre et transparente les relations de travail, l’offre de formation, les financements et les modalités d’adaptation aux particularités de l’alternance des process pédagogiques pour en améliorer la qualité et viser une qualification durable.

Enfin, ils assurent à leurs apprentis une assistance tant en termes d’accompagnement pour trouver un employeur et de suivi tout au long de son contrat, de logement, d’insertion professionnelle, de mobilité internationale…, qui complète celle que peuvent apporter les établissements d’enseignement supérieur.

En voulant totalement libéraliser le dispositif de l’apprentissage et mettre face-à-face l’entreprise et l’opérateur de formation, la réforme, ignorant ainsi la valeur ajoutée apportée par les CFA en réseau, va conduire à un très fort affaiblissement de l’apprentissage à la fois quantitatif et qualitatif. L’ANASUP exprime donc ses craintes de voir remise en cause une organisation qui a pourtant fait ses preuves. Si tel est le cas, cela va complexifier la construction de passerelles entre la voie de formation classique et l’apprentissage, entre l’apprentissage infra bac et l’enseignement supérieur, comme le souhaite le Gouvernement. Par ailleurs, imposer un coût au contrat de type forfaitaire entraînera un désengagement très rapide des établissements d’enseignement supérieur du dispositif de l’apprentissage.

Prévenir 3 fractures pour préserver l’apprentissage dans l’enseignement supérieur :

L’ANASUP appelle aujourd’hui à considérer le risque d’une triple fracture :

Une fracture entre les grandes entreprises et les TPE/PME/START-UP-employeurs publics, puisque seules les premières seront toujours capables d’attirer et de financer sur d’autres lignes budgétaires que la taxe d’alternance des profils de haut niveau,
dont les formations seront par nature plus onéreuses que ce que permettra un coût forfaitaire au contrat;

Une fracture entre les universités et les grandes écoles, ces dernières étant mieux armées, grâce à leurs réseaux, pour négocier des contrats auprès des grandes entreprises et récupérer des ressources ;

Une fracture entre les territoires, en particulier entre Paris et les régions, les grandes entreprises et les grandes écoles, qui pourront continuer d’utiliser le dispositif de l’apprentissage pour les raisons évoquées, siégeant majoritairement dans la capitale et sa petite couronne.

Il est dommage que le rapport de Sylvie BRUNET n’aborde pas ces questions. Il est toutefois très clair que sans le rôle des CFA interprofessionnels en réseau les risques énoncés vont inverser la tendance actuelle et conduire à une baisse significative des effectifs d’apprentis de l’enseignement supérieur. La mise en place de ruptures conventionnelles collectives trouvera alors tout son sens au sein de ces structures…

ANASUP, le 5 février 2018

L’Association Nationale pour l’Apprentissage dans l’Enseignement Supérieur fédère le réseau de 40 CFA du Supérieur (Universités et Grandes Ecoles) et représente près de 50 000 apprentis du niveau III (DUT, DEUST) au niveau I (Masters, Ingénieur).

Contacts :

Président
Yves Cimbaro FormaSup Ain Rhône Loire 66 avenue Jean Mermoz – BP 8048 –

69351 LYON cedex 08 Tel : 06 08 30 82 18 Yves.cimbaro@wanadoo.fr

Frédéric Sauvage, Formasup NPC ; Frederic.sauvage@formasup-npc.org

Laurence Bancel-Charensol, CFA SUP 2000 ; l.bancel-charensol@cfasup2000.fr Valérie Cantat-Lampin, CFA FORMASUP-Paris ; cantat-lampin@formasup-paris.com Guy Bories, CFA EVE ; g.bories@cfa-eve.fr